Quel est le risque de pénurie d’eau en France ?

Publié le 2 juin 2023

Les épisodes de sécheresse récents et qui devraient s’amplifier avec le réchauffement climatique font craindre le pire.

Selon certains hydrologues, il y aurait un risque réel de pénurie d’eau potable en France. En réalité la situation doit être plus nuancée. Le risque de pénurie d’eau dépend de la région. A l’échelle de la France, il est très faible.

Ce risque – réel à court terme et dans certaines régions – peut être évité à moyen terme à condition d’appliquer des mesures d’économies d’eau drastiques.

Quel est le risque d’une pénurie d’eau potable en France d’ici 2050 ?

Selon le Centre d’Information sur l’Eau, une association créé à l’initiative des professionnels qui assurent la gestion des services publics d’eau et d’assainissement en France, les français sont loins de risquer un stress hydrique.

Des réserves en eau fortement supérieures aux besoins

Selon le C.I.EAU, en France, la ressource en eau disponible s’élève à 191 milliards de m3 par an tandis que la globalité des besoins du pays s’élève à 32 milliards de m3 par an.

Un Français dispose ainsi en moyenne de 3265 m3 d’eau par an alors que le seuil de stress hydrique établi par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) est de 1700 m3.

Cependant, ceci reste une moyenne. Le manque d’eau peut affecter certaines régions plus sévèrement en raison de différentiels de pluviométrie.

Mais selon l’organisme, en France, en cas de sécheresse, l’approvisionnement de la population en eau potable ne serait pas menacé. Il précise que “les sources d’approvisionnement sont variées et les réseaux sont suffisamment interconnectés pour pallier à un manque d’eau” d’une région à l’autre.

Pourtant les nappes nappes phréatiques n’arrivent pas à se recharger

Le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) publie chaque mois un état des nappes souterraines. Les derniers relevés indiquent que les nappes accusaent un déficit pluviométrique qui s’est encore amplifié entre 2022 et 2023.

75% des niveaux des nappes restent sous les normales mensuelles (58% en mars 2022) avec de nombreux secteurs affichant des niveaux bas à très bas.

Carte établie le 11 avril 2023 par le BRGM, à partir de données de la banque ADES acquises jusqu’au 31 mars 2023. Source des données : banque ADES / Fond de carte © IGN, BD Carthage.

Si la sécheresse perdure, et cela semble acquis à l’heure où nous rédigeons ces lignes, l’eau potable pourrait donc bel et bien manquer cet été.

Lors de la sécheresse de 2022, près de 700 communes ont rencontré des problèmes d’eau potable et 550 d’entre elles ont dû être alimentées par camions citernes.

De façon inéluctable, “certaines régions seront plus touchées en raison du type de sol et du type de nappes”, explique l’hydrologue Emma Haziza et de citer “le pourtour méditerranéen – en particulier la Provence -, le Poitou-Charentes, le Grand Est et la vallée du Rhône”.

Les territoires les plus vulnérables sont les régions à relief calcaire (Alpes, Jura, Languedoc, etc.) et les régions à roches socle (Bretagne, Creuse, Cantal, Corse…).

Une meilleure gestion des ressources en eau pour réduire le risque de pénurie d’eau

Pour le C.L.EAU, cette situation ponctuelle ne remet pas en cause l’état des ressources en eau, “les stocks étant largement suffisants pour alimenter les besoins en eau de la population.”

Et de mettre en avant la solution qui consiste à réalimenter les nappes quand leur niveau devient trop bas, en utilisant des eaux de surfaces ou des eaux usées assainies.

A noter : le plan national sur l’eau a été dévoilé fin mars 2023 pour « organiser la sobriété ». Les fuites d’eau, qui représente 20 % de l’eau potable, sont un des leviers d’action les plus efficace à court terme pour préserver la ressource.

L’exemple alarmant de la Drôme

Le syndicat mixte de la rivière Drôme a présenté les conclusions d’une étude climatique. Le résultat est sans appel : en 2050, sous l’effet d’une haiusse de la température de l’air de 1,6°C, le manque en eau dans la vallée de la Drôme aura de fortes conséquences :

+16% d’augmentation des besoins en eau potable de la population
+25% à 35% de besoins d’irrigation pour l’agriculture.

Il est donc important de réagir dès à présent avec des mesures d’économie d’eau.

Certains cultures comme la vigne ou les noyers pourraient avoir besoin d’irrigation d’ici 2050.

Conséquence de l’appauvrissement des nappes phréatiques

80 à 90 % de l’eau potable que nous consommons provient des nappes phréatiques aujourd’hui à un niveau bas. L’eau souterraine est utilisée en priorité comme source d’approvisionnement car elle de meilleure qualité que l’eau de surface car elle est filtrée par les roches.

Si les nappes phréatiques venaient à se vider, les conséquences seraient multiples :

  • L’alimentation en eau potable ne sera pas possible localement, ce qui implique des transferts d’eau plus coûteux.
  • L’agriculture devra se transformer et les produits alimentaires connaitront une forte inflation.
  • L’énergie hydraulique ne pourra pas fonctionner normalement avec des risques de coupures de courant localisées.

A noter : selon les Nations unies, l’eau pourrait devenir dans les prochaines dizaines d’années un bien plus précieux que le pétrole, et donc une source de conflits internationaux.

Exemple de projet de transfert d’eau

En France, dans les années 2010, un projet a été lancé pour transférer de l’eau du Rhône vers l’Hérault et l’Aude. Ce projet, appelé Aqua Domitia et soutenu par la région Occitanie, a pour objectif de soulager la pression sur les ressources en eau déficitaires des régions de Montpellier et Narbonne, tout en sécurisant l’approvisionnement en eau potable dans une zone connaissant une forte croissance démographique, ainsi que l’approvisionnement en eau pour l’irrigation.

Le projet comporte la construction d’une canalisation souterraine de 130 km de long, capable de transporter 2,5 m³ d’eau par seconde. Cette canalisation permettrait d’apporter 8 millions de m³ d’eau provenant du Rhône, un fleuve qui conserve un débit élevé pendant l’été, ce qui permettrait de remplacer les prélèvements équivalents actuellement effectués dans les nappes souterraines et les cours d’eau du Gard, de l’Hérault et de l’Aude.